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Les murs en moellons liés à la chaux.

 

Jusqu'au début du vingtième siècle, chaque région possédait son type de construction propre qui dépendait des traditions locales et des matériaux à disposition sur les lieux-mêmes des constructions ou à proximité immédiate.

A partir de cette période, le béton a fait son apparition et s'est rapidement imposé.

Le but de ce petit reportage n'est pas de retracer les différents modes de construction appliqués à travers les âges mais plutôt de tenter de répondre à la question simple suivante :

Le bâtiment que j'habite est plus que centenaire ; comment a-t-il été construit ?

Précisons encore que cette enquête s'applique avant tout aux constructions de l'arc jurassien et concerne surtout nos bâtiments faits en moellons liés à la chaux, ce qui représente encore plus du 60% de nos maisons, villes et campagnes confondues.

 

SOMMAIRE

Les différents matériaux utilisés pour la construction à travers les âges

2. Différentes utilisations de la pierre

3. Les murs en moellons

4. La chaux

 

1. Les différents matériaux utilisés pour la construction à travers les âges

Ceux-ci dépendent:

  • du climat de la région où la construction était réalisée, On ne va pas construire des murs épais pour se prémunir du froid dans une région à climat chaud et parallèlement, on évitera les galandages légers dans les régions froides,
  • de la proximité du matériau à utiliser. Avant les années 1940, le problème du transport des matériaux était important puisque que nous ne possédions pas les moyens que nous avons actuellement, donc nous utilisions en priorité la matière première située alentour.
  • de l'affectation de la construction (habitation, abri, réduit, etc...)

Le bois

Le bois est sans aucun doute le plus ancien matériau utilisé pour la construction d'abris tout d'abord puis de maisons par la suite.moellons3a

Une fois sorti de sa caverne, l'homme a utilisé le bois pour s'abriter en fabriquant des cabanes de branchages. Par la suite, les lacustres, il y a 4000 ans, l'ont utilisé pour construire, au bord des lacs, des plate-formes sur lesquelles ils édifiaient leurs maisons, en bois également.

Au Moyen-Age, le bois était le matériau de construction par excellence à tel point que son emploi fut réglementé à partir du XIII siècle pour éviter (déjà à cette époque!) la déforestation.

Certaines administrations locales françaises limitèrent son emploi en obligeant de construire en pierre ou en briques dans certaines villes. Ces mesures servaient également à limiter les risques d'incendies qui, dans certains cas pouvaient détruire des villages entiers, surtout lorsque les maisons étaient mitoyennes

Dans le Jura, les constructions en bois sont également très présentes. Si nos fermes neuchâteloises ont une assise en pierre ou en moellons dans laquelle se trouvent généralement moellons4la partie habitable et l'écurie ou l'étable, la partie supérieure, réservée à la remise et à la grange, était souvent en bois, recouverte d'un toit de bardeaux reposant sur une forte charpente.

Ces charpentes, supportant souvent d'importants pans de toit, sont, dans bien des cas, impressionnantes et de très bonne facture.

D'autre part, les séchoirs et autres remises indépendantes ou attenantes au bâtiment principal étaient très souvent construites exclusivement en bois.

En d'autres régions, au Valais par exemple et principalement dans le Val d'Anniviers et le Val d'Hérens, les fameux mazots ou raccards sont exclusivement faits de bois et servent moellons5encore actuellement, pour certains d'entre eux, au stockage du blé pour le mazot et des céréales pour le raccard.

Concernant ces derniers, ils sont construits sur des dalles rondes en pierre reposant sur des pieux en bois afin d'empécher les souris et autres prédateurs de rentrer dans le raccard.

Les chalets que l'on rencontrent en toutes régions et qui servent alors d'habitations sont également en bois, par définition.

La maison dite "en colombage" ou "en pan de bois", selon les régions, est une maison constituée d'une ossature de bois faite de sablières, de poteaux et de tournisses (bois horizontaux, verticaux et obliques) et d'un "hourdage", qui forme les murs et qui a un rôle de remplissage et de moellons7raidisseur. Il est fait de briques, crues le plus souvent (voir plus bas) ou de matériaux légers comme le torchis ou le plâtre, éventuellement de moellons dans le cas où l'ossature est constitué de parties métalliques, selon les régions.

Cette technique était connue dans l’Antiquité romaine et a été utilisée en France au moins dès le Haut Moyen Âge jusqu’au XIXe siècle. Cependant, dès le XVIIe siècle et durant tout le XIXeme, on plâtre les façades des maisons à pans de bois afin de leur donner un aspect plus luxueux et moderne. Mais de nombreuses maisons à colombage subsistent un peu partout en Europe et même dans le Jura.

Actuellement, le bois a de nouveau la cote! Il répond à une tendance qui se veut davantage écologique. Les techniques de constructions en bois se sont fondamentalement moellons6modernisées. Le bois a gagné d’importantes parts de marché par rapport aux autres matériaux de construction. La "maison" en bois est aujourd’hui dominée par des systèmes à ossature en bois massif que ce soit en fustes (billes de bois non calibrées et irrégulières assemblées sur place comme les raccards par exemple) en rondins (même technique que les fustes sauf que les billes sont calibrées et assemblées de manière précise) ou en madriers (comme les rondins si ce n'est que les pièces de bois sont travaillées afin d'être rectangulaires et non rondes).

La brique

Le mot brique est issu de « brik », mot flamand, qui désigne un morceau. En franco-provençal, et en Suisse romande on parle aussi de carron. D’où la présence fréquente dans les environs des châteaux dombistes et bressans de lieux-dits « La Carronnière », où l’on cuisait ces fameux carrons nécessaires à la construction des châteaux.

Un brin d'histoire

Il faut distinguer 2 types de briques utilisées pour la construction : les briques crues et les briques en terre cuite.

La brique crue

moellons9Elle date de 7500 ans avant J-C puisque certaines ont été découvertes à cette date à Jéricho, au Moyen-Orient. Elle est appelée également « Adobe » et permettait, ce qui est encore le cas aujourd'hui, de monter des habitations ou des monuments. Elle reste cependant fragile et résiste mal aux intempéries.

Il faut donc l'enduire ou la recouvrir d'un mortier qui lui est spécialement destiné pour la protéger. La brique crue est faite de terre et/ou de limon mélangé à d'autres matériaux . Le mélange est ensuite mis dans des moules en bois, afin de donner aux briques des formes identiques. Elles sont ensuite séchées au soleil.

Ce matériau est toujours utilisé aujourd'hui dans certaines régions qui possèdent un climat très sec.

En comprimant fortement la brique, on peut ainsi extraire une importante quantité d'eau, ce qui accélère le moellons11temps de séchage, et a pour effet d'augmenter sa solidité. C'est ce procédé qui a été utilisé à partir de l'an mil d'abord dans le midi toulousain puis au XIème siècle dans le nord de la France et ensuite dans toute l'Europe.

La brique en terre crue change de composition selon l'endroit où elle est fabriquée par rapport aux matériaux présents sur place et par conséquent, sa dénomination est différente. En voici, rapidement et de manière non exhaustive sa terminologie :

 

  • Lorsqu'une terre est riche en argile, on fait du "pisé".
  • Avec une valeur moyenne, on fait de l'adobe ou de la "bauge".
  • Avec une valeur plus faible d'argile, on rajoute de la paille et de la bouse pour faire du "torchis".
La brique en terre cuite

La brique artisanale en terre cuite se prépare à partir d’argile. C’est donc une céramique comme la faïence, le grès et la porcelaine. Les premières briques en terre cuite ont été moellons13confectionnées au 3ème millénaire avant J-C. déjà. Elles étaient pleines et ont permis la construction d'immeubles de grandes dimensions. La ville de Toulouse, surnommée "ville rose" a été en grande partie réalisée en terre cuite. Dans les alentours de la ville, on trouve certains villages réalisés entièrement en briques rouge. Ne pas confondre avec d'autres villages du Périgord réalisés, eux, en pierre rouge, tel que Collonge-la-Rouge, par exemple.

Traditionnellement, on extrayait l'argile en hiver. Cette terre était ensuite broyée et malaxée à même le sol, souvent naturellement par le passage du bétail jusqu'à obtenir une pâte homogène et malléable. Cette tradition a été respectée jusqu'à l'arrivée des malaxeurs mécaniques, au début du vingtième siècle.

Cette pâte était ensuite moulée (moules en bois) pour en faire des briques, qui étaient séchées ainsi durant quelques jours à plat sur le sol et retournées régulièrement afin moellons16d'assurer un bon séchage garant d'absence de fissures.

Après quelques jours ces briques acquéraient une certaine résistance mécanique et on les empilait en petits murets d'environ 1 m. de hauteur appelés "haies" ou "châteaux", selon les régions, comme ceux érigés à l'époque par les tourbiers, dans nos vallées jurassiennes

Lorsqu'on avait suffisamment de briques on passait alors à la cuisson. On construisait un four sur place appelé four périodique à l'aide de briques réfractaires. Les carrons étaient entassés à l'intérieur; le feu était ensuite allumé avec le bois trouvé alentour et maintenu durant une semaine environ à une température située entre 800 et 1200 degrés.

Au début du vingtième siècle la confection des brique cuites s'est développée en toutes régions de l'Europe et la production est devenue industrielle telle que nous la connaissons maintenant avec les briques perforées.

Le métal

Si le métal est de plus en plus utilisé dans la construction (structures acier, revêtements aluminium) principalement pour des hangars et des entreprises, ce n'était pas le moellons17cas au début du siècle passé. Seuls certains immeubles, du même type que les maisons en colombages ont été érigés avec une structure acier, le hourdage étant fait, dans le cas de cette ancienne usine à Fleurier datant de la fin du XIXème de briques en terre cuite.

Le métal a plutôt été utilisé pour la réalisation d'ouvrages d'art; principalement des ponts. Gustave Eiffel, créateur de la tour du même nom, est passé maître en la matière.

Le verremoellons18

Ce matériau est relativement nouveau dans la construction.

Il est utilisé principalement comme hourdage entre les structures métalliques ou comme protection ou isolation de façades déjà existantes comme ci-contre.

Le verre est également souvent utilisé lors de réfection d'imeubles anciens. L'utilisation de ce matériau permet de conserver certaines structures traditionnelles en pierre ou en moellons en les protégeant, contrairement à d'autres matières non-transparentes.

La pierre

C'est encore le matériau prédominant dans nos régions jurassiennes pour la construction bien qu'actuellement, il ne se fasse presque plus de maisons en pierre. Elle est de plus en plus remplacée par la brique, encore davantage par le béton et depuis quelques années également par le bois qui est de retour comme signalé plus haut.

Les constructions en pierre représentent encore plus du 60 % de nos habitations. Si la plupart de nos maisons sont réalisées en moellons, les constructions en pierre sont de 3 types:

  • La pierre sèche
  • La pierre de taille
  • Le moellon

2. Différentes utilisations de la pierre

La pierre sèche

La maçonnerie à pierres sèches (ou à sec ou sèche) est la pose de pierres, brutes ou ébauchées, sans recourir à un quelconque mortier ou liant, pour monter un mur ou une voûte. On ne la confondra pas avec la maçonnerie à joints vifs.

Dans nos régions, la maçonnerie à pierres sèches concernait avant tout les murets présents sur une bonne partie de nos pâturages jurassiens. Ces murets, dont certains se dégradent à une vitesse "grand V", bénéficient actuellement de l'aide de nombreux bénévoles qui oeuvrent à leur restauration.

Une partie d'entre eux sont à parement simple, une couche de pierres empilées (fig 1) ou à double parement (fig2). L'avantage du double parement était que le muretier ou murailleur pouvait entreposer entre les 2 parements les matériaux résultant des tailles grossières effectuées ou des "cailloux" récupérés alentour plutôt que de devoir les entreposer dans des "murgiers" , prévus à cet effet (fig.3).

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fig.1                                                              fig.2                                                            fig.3

La maçonnerie à pierres sèches a également été utilisée pour la construction de cabanes pour les bergers (fig.1) ou abris pour le matériel (fig.2). Ces constructions sont de plusieurs types selon les régions. Celles conçues à l'époque dans le Jura ont malheureusement disparu pour la plupart. Il ne reste que des vestiges (fig.3).

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fig.1                                                             fig.2                                                             fig.3

La pierre de taille

La maçonnerie à pierres de taille concerne, comme son nom l'indique, l'utilisation de pierres préalablement choisies et taillées de manière à ce qu'elles puissent être assemblées, avec ou sans liant. Par rapport aux murs en moellons que nous présenterons plus bas, ce type de construction était beaucoup plus onéreux, d'une part par rapport au travail de taillage de la pierre et d'autre part par rapport au transport de celle-ci avec les moyens de l'époque.

Dans nos régions jurassiennes les carrières étant à même de produire de la pierre de taille n'étaient pas légion. On trouve un peu de calcaire blanc (fig1) mais on parle surtout de la pierre d'Hauterive, calcaire jaune très prisé sur le littoral(fig.2) ainsi que dans une moindre mesure de la pierre de Boveresse, très semblable à la pierre d'Hauterive (fig.3).

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calcaire blanc                                                  pierre d'Hauterive                                   pierre de Boveresse

Le moellon

Comme signalé plus haut, plus du 60 % de nos maisons sont faites, entièrement ou en partie en moellons, selon les cas.moellons29

Cette technique ancestrale, puisque les Romains l’utilisaient déjà, a progressivement disparu à partir de la moitié du XIXème siècle avec l’apparition de la brique industrielle. Mais des maisons en moellons se sont encore construites jusque dans les années 30 environ.

On peut dire que la commercialisation à grande échelle du béton puis du béton armé a donné le coup de grâce aux murs en moellons, jusque-là en concurrence avec la brique.. Et bientôt plus personne ne sera capable de réaliser une construction en moellons.
Heureusement que certaines organisations se préoccupent de ce problème en redécouvrant ces anciennes techniques, conme à Guédelon, en Bourgogne, où des "oeuvriers" construisent actuellement un château fort en respectant toutes les techniques de l'époque.
Ci-contre, une splendide réalisation en moellons, la Maison des Six Communes, Hôtel de Ville de Môtiers/NE, commune de Val-de-Travers.

3. Les murs en moellons

Techniques de montage

En quelques mots, la technique est la même que pour un mur en pierres sèches si ce n’est qu’un mortier est utilisé pour lier les pierres entre elles.

Entrons un peu plus dans les détails.

Il existe des constructions entièrement réalisées en moellons mais souvent et surtout à partir du milieu de XIXème siècle, le type de construction est mixte ; mélange de pierres de taille et de moellons, les pierres de taille étant utilisées pour la fondation contre terre (fig 1) et/ou pour la réalisation des façades exposées aux intempéries (fig.2) de même que pour les encadrements (fenêtres et portes) et les chaînes d’angles (fig.3). Lorsque l’on n’avait pas de pierres de taille, on choisissait des moellons de bonnes dimensions ayant une, voire deux surfaces régulières et plates.

Très souvent aussi la base du mur s’appuyait sur un soubassement en roc ou calcaire blanc, peu sensible aux intempéries et donc à l’humidité.

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fig.1                                                               fig.2                                                             fig.3

Le mur de façade en moellons a une base d’environ 70 cm d’épaisseur lorsqu’il prend assise sur le terrain. Cette largeur décroît en s’élevant. Les moellons sont empilés de moellons60manière à ce qu’il y ait le moins d’espaces possible. Des éclats de roche sont insérés pour caler les blocs entre eux. Les parties les plus régulières et plates des blocs sont mises à l’extérieur des murs. Ce sont les parties visibles qu’on appelle les "parements". L’intérieur est comblé par différents matériaux, cailloux ou rejets de taille, "le fourrage". Des pierres transversales sont placées de temps en temps pour rigidifier l’ensemble. Elles sont appelées "boutisses" et "parpaignes" lorsqu’elles traversent l’épaisseur complète du mur. Le tout est lié par un mortier abondant à la chaux.
Cette description correspond à la technique utilisée dans les régions jurassiennes. Les variantes sont multiples, selon les régions. L'épaisseur des murs, par exemple, peut varier, surtout en fonction du climat.

Aspect extérieur du mur

L’aspect du mur terminé varie beaucoup en fonction des moellons utilisés, blocs bruts, galets, pierres équarries, dalles nacrées, etc. Les murs étant érigés avec le matériau se trouvant à proximité, leur apparence varie donc énormément d’une région à l’autre. Il faut également souligner que la plupart du temps, dans nos régions surtout, les moellons n’étaient plus visibles puisqu’ils étaient recouverts d’un crépi à la chaux dont nous parlerons plus loin.

Ci-dessous, quelques exemples de murs en moellons non crépis: moellons arrondis, Auvergne, (fig.1), moellons/galets, bord du lac NE, (fig.2), moellons équarris, montagnes NE (fig.3).

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fig.1.                                                            fig.2                                                             fig.3

4. La chaux

La chaux est l’élément indispensable pour la confection d’un mur en moellons et encore actuellement elle ne peut être remplacée par un autre liant, lors de réfections par exemple, d’où la question suivante; la chaux… c’est quoi ?

La chaux, c'est quoimoellons37

Selon wikipedia, la chaux est une matière généralement poudreuse et de couleur blanche, obtenue par décomposition thermique du calcaire. Elle est utilisée depuis plus de 10'000 ans notamment dans la construction, pour les mortiers et pour les crépis.

Les Romains l’ont déjà beaucoup utilisée pour différentes grandes réalisations telles que des acqueducs, des amphithéâtres, des ponts... etc, dont les exemples visibles sont encore nombreux et parfois dans un fort bon état de conservation.

D’où la question suivante que l'on peut se poser : Comment la chaux est-elle produite et où se trouve-t-elle ?

moellons38L’origine de la découverte de la chaux n’est pas réellement connue. Il n’y a pas eu de Monsieur Delachaux qui en fut l’inventeur comme cela a été le cas pour la poubelle ou le moteur Diesel !

Très succinctement, pour obtenir de la chaux, il faut chauffer du calcaire à une température de 800 à 1000 degrés durant environ 1 semaine. On obtient alors ce qu’on appelle de la « chaux vive ». Il faut ensuite précipiter ce produit dans de l’eau afin de le réduire en poudre pour obtenir de la « chaux éteinte ». C’est cette nouvelle matière alliée à d’autres éléments qui, pendant des millénaires, a été utilisée comme mortier ou crépi dans le domaine de la construction., jusque dans les années 1930 environ.

Les fours à chaux

On peut donc imaginer que l’homme de la Préhistoire avait découvert la chaux en maîtrisant le feu. Les pierres calcaires qui entouraient ces foyers brûlaient et finissaient par se décarbonater donnant de la chaux vive. Puis la pluie tombant sur les foyers, transformait la chaux vive ainsi hydratée moellons40en chaux éteinte. Forts de ces expériences, nos ancêtres , qui n’étaient pas forcément gaulois !, ont eu l’idée de construire des fours pour obtenir cette précieuse poudre blanche.

Le problème est que ces fours étaient construits pour une courte durée, d'une part à proximité de l’endroit où les constructions allaient être érigées et d'autre part près d'un lieu où le calcaire à utiliser était présent.

Ils étaient ensuite démontés pour être reconstruits dans un autre endroit, en fonction d’une construction future. Nous n’avons donc pas ou « très peu » de vestiges d’anciens fours à chaux. Il faut dire à ce sujet que les pierres réfractaires utilisées pour ces fours étaient précieuses.

Heureusement, le « très peu » a permis à certains amoureux des anciennes traditions de redécouvrir la conception d’ un four à chaux. C’est le cas par exemple à St Georges, dans le canton de Vaud où une équipe de bénévoles a remis en état et fait fonctionner un ancien four à chaux (voir reportage).

Le ciment, la chaux, le béton

Selon la définition du « Petit Larousse », le ciment est une poudre qui, additionnée de sable et d’eau, forme une matière durcissant au séchage et liant les matériaux de construction.

moellons41Selon cette définition, la chaux est donc un ciment. La différence entre la chaux et le ciment réside dans le fait que la chaux peut être qualifiée de ciment naturel alors que la matière que l’on connaît communément sous le nom de « ciment » devrait être appelée « ciment artificiel ».

Il est parfois appelé « ciment Portland » par rapport à sa couleur qui ressemblait aux célèbres pierres des carrières de la péninsule de « Portland » situées en Manche.

En quelques mots un ciment artificiel est un produit provenant de la cuisson de mélanges artificiels (de la main de l'homme) de silice, d'alumine, de carbonate de chaux.

La découverte du ciment artificiel, au milieu du XIXe siècle a rapidement remplacé la chaux dans toutes les constructions modernes en raison d'une rigidité plus importante et surtout d'un coût moindre.

Qu’en est-il maintenant du béton ?

Le béton n’est pas un liant mais un matériau de construction fabriqué à partir de granulats naturels (sable, graviers) ou artificiels (en fonction de son utilisation), aggloméré par un liant ; le plus souvent du ciment Portland.

Le béton peut être assorti d’une structure métallique ; on parle alors de béton armé.

Et la chaux dans tout ça?

Ce ciment naturel en voie de disparition au milieu du siècle dernier obtient un regain d’intérêt depuis une quarantaine d’années grâce à une grande qualité que le ciment artificiel n’a pas ; sa perméabilité. Laissant passer l'air tout en étant étanche à l’eau, la chaux est le liant idéal des maçonneries en pierre.

En effet le ciment est incompatible avec la maçonnerie de bâtis anciens en moellons et pierres de taille. Le ciment étant un matériau rigide et imperméable à l'air, il ne convient pas à une maçonnerie traditionnelle qui nécessite de la souplesse et une perméabilité à l'air. Celle-ci permet à une maçonnerie de s'assécher. L'eau qu'elle absorbe par la pluie ou des remontées capillaires, peut s'évacuer par ces joints à la chaux alors que dans le cas d'un mortier au ciment, le mur ne peut pas s'assécher et conserve l'eau qu'il absorbe ce qui peut entraîner l'apparition de salpêtre, de mousses microscopiques, d'auréoles, de taches, et de coulures.

Il en est de même au niveau des crépis. Ceux dit « à la chaux » sont privilégiés pour recouvrir un mur en moellons par rapport aux crépis ciment, pour les mêmes raisons que ci-dessus.

moellons43moellons44moellons45

formation de salpêtre (moisissure)     pierres liées avec du ciment              crépi ciment sur briques crues

Terminons par une lapalissade qui n’en est pas une!
Le lieu-dit « CHAUX » et « la chaux » n’ont rien à voir ensemble. Le lieu-dit (tels La Chaux-de-Fonds, La Chaux du Milieu, La Chaux d’Abel, La Chaux ou simplement Chaux) correspond à un terrain de piètre qualité. Pas de rapport donc avec un four à chaux ou une carrière de calcaire.

André Beuret

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(Vos précisions et compléments à ce reportage seront reçues avec intérêt)

Références et liens

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2114 Fleurier
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